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à l'aube d'une Eve nouvelle
2 janvier 2015

Le choix

LE CHOIX

 

 

Ça y est. Ce lundi de rentrée tant attendu était enfin arrivé.

Pff... Ces vacances de fin d'année étaient toujours épuisantes. Encore plus particulièrement cette année.

Brenda étouffait à la maison. Entre sa nichée hystérique (effet "cadeaux de noël à gogo") et son mari ivre de manière permanente (effet "bonne année! On trinque ???"), elle n’avait pas beaucoup de latitude…

Mais ça y est, cette fois, ils étaient partis. Il restait bien Doug dans un  coin de la maison mais ça ne comptait pas, elle n'avait pas besoin de le sermonner pour qu'il s'habille...

Alors elle s'activait et chaque recoin de la maison reprenait peu à peu sa configuration habituelle, rassurante.

Elle travaillait énergiquement.

Ranger l'entrée, trier le linge, faire passer ces paquets de linge du lave-linge au sèche-linge, re-trier le tri sélectif après que ses charmants pré-ados, qui se foutent de tout, l'aient fait, fermer les portes des placards, passer l'éponge sur la table du petit déjeuner, porter les bacs de recyclage à l'extérieur de la maison pour les vider quand elle ira chercher le plus jeune à la sortie de l'école... Toute une partition bien huilée et exécutée avec maestria.

Brenda s’y retrouvait enfin.

Après avoir accompli chacune de ces tâches minutieusement et docilement, elle se sentit lasse. Elle s'autorisa alors une pause.

"Jusqu'à la fin du cycle de la machine à laver le linge" se dit-elle.

Brenda se rendit dans la cuisine et prépara une tasse de son thé préféré. Celui qu'elle ne réservait qu'aux grandes occasions. C'était d'ailleurs curieux, elle aurait très bien pu se l'autoriser plus souvent, pourquoi pas quotidiennement... Ce n’était  pas un thé plus cher que les autres, c'est juste qu'elle l'aimait tellement qu'elle le rendait rare et exceptionnel. Peut-être avait-t-elle peur de ne pas l'apprécier à sa juste valeur si elle en buvait plus souvent...

Le sifflet de la bouilloire la tira de ses réflexions et l'obligea à se remuer. Elle referma la boîte de lapsang-souchong, plongea la boule à thé dans SA tasse et versa par dessus l'eau frémissante. Brenda était une femme de précision qui se sentait rassurée par toutes les choses qu'elle effectuait de manière immuable... Elle s'assit face à la baie vitrée, scruta les mangeoires à oiseaux en quête d'un peu de compagnie : un petit rouge-gorge, quelques mésanges... Et puis elle se laissa aller à la rêverie, euthanasiée par les effluves du thé fumé.

"Dans la vie il faut choisir.

Choisir c'est renoncer.

A quoi je renonce, alors, si je continue sur ce chemin?"

Était-ce l'odeur corsée du thé, presque chargée de testostérone qui l'avait mise sur cette voie, ou était-ce un vrai ras-le-bol de ce qui lui manque dans son union avec Doug?

A quoi renonce-t-elle si elle continue dans son mariage avec Doug?

Peut-être à connaître une vraie relation amoureuse avec quelqu'un qui la fasse vibrer, qui lui fasse connaître l'extase, l'amalgame et l'abandon.

Plus elle y réfléchit, plus elle se dit qu'avec Doug ils sont vraiment amis, de très bons amis, d'excellents amis même! Respectueux l'un de l'autre, ayant envie de bien faire pour l'autre, complices à point extraordinaire...

Mais...

Mais pas amoureux.

Leur quotidien est riche, intéressant, émouvant. Ils ont très à cœur de vivre pleinement leur rôle de parent. Mais ils ne sont pas amoureux et ont de plus en plus de mal à être amants.

 

Mais d’un autre côté si elle part essayer de vivre sa vie de femme, à quoi renonce-t-elle?

Elle renonce à l'incroyable confort de son quotidien bien huilé avec un mari qui participe à tout, qui dit oui à toutes ses exigences paritaires.

Elle renonce à la sécurité que lui procure cette situation stable...

Elle s'imagine vivre l'incertitude, l'insécurité... Tout cela est-il fait pour elle?

Elle n’en est pas sûre…

Mais elle s'imagine également trouver la protection physique et virile qui lui manque actuellement.

Elle n'arrive pas à trouver le bon canal pour atteindre Doug, pour qu'il lui apporte mieux ce dont elle a besoin quand elle lui demande de la protéger. Peut-être a-t-il autant peur qu'elle? Elle ne comprend pas toujours bien ses réactions. Ce qu'elle comprend, c'est que quelque chose est cassé dans les liens qui les unissent.

 

Elle n'arrive pas à choisir, elle n'arrive pas à renoncer, alors elle préfère se bercer de douces illusions et faire des rêves fous, des rêves dans lesquels sa vie conjugale serait dissociée de sa vie amoureuse.

 

Ce serait légitime.

Ce serait bien.

Ce serait normal.

Pourquoi se refuser à ce nouveau modèle?

 

"Chérie, t'as pas vu mon pantalon noir?"

La voix de Doug la réveille, elle sursaute. Les traits de son visage se radoucissent; elle perd cette expression d'inquiétude et de gravité et retrouve son masque d'épouse par-faite!

"J'arrive Douggy!"

Elle court dans les escaliers, essayant de repartir le plus vite possible dans son train-train et en se jurant que jamais plus, elle ne boirait le thé du dimanche un lundi matin!

 

 

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Commentaires
O
Moi je trouve que c'est tres bien ecrit.... Je me retrouve un tout petit peu..... Mais je prefere de loin suivre la serie "Brenda" ! Sa vie c'est comme les pages de mon magazine prefere ou d'un bon roman ! Merci pour ce partage.
C
Il n'y a pas la passion amoureuse mais il y a la bienveillance, le désir de rendre l'autre heureux, n'est ce pas là le secret d'une histoire d'Amour avec un grand A.
S
Je suis sûre que beaucoup de femmes se retrouverait dans tes mots ...
à l'aube d'une Eve nouvelle
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